Chaque année, les Archives cantonales vaudoises (ACV) proposent une exposition thématique. L’institution met ainsi en valeur un de ses fonds tout en pointant un paradoxe de l’activité d’archiviste au 21e siècle. Après l’archivage numérique en 2015, c’est la conservation des données personnelles qui a été choisie cette année, sous le titre «Archives psychiatriques: "faut-il consulter?"».
Cinq cents mètres linéaires d’archives psychiatriques
Un important versement d’archives psychiatriques vaudoises est à l’origine de l’exposition. «Cinq cents mètres linéaires en deux ans», précise l’archiviste Gilles Jeanmonod. Collectés à l’hôpital psychiatrique de Cery dès sa création à Prilly en 1873 et dans d’autres institutions psychiatriques cantonales, les documents sont variés: dossiers de patients – truffés de données personnelles –, mais aussi expertises médico-légales, protocoles d’autopsie ou archives administratives renseignant sur la gestion de l’hôpital.
Les ACV en voient de toutes les couleurs
Les dossiers psychiatriques ont cette particularité qu’ils contiennent beaucoup de dessins et peintures réalisés par les patients durant leur internement. Colorées et troublantes, ces œuvres anonymisées – à la place des noms des patients qui en sont les auteurs, figurent de simples numéros de dossiers – pareront les murs des ACV jusqu’à la fin de l’année.
Au-delà de l’exemple psychiatrique
Mais comme le souligne Florence Choquard, historienne et conceptrice de l’exposition, «la thématique des données personnelles est plus vaste que la psychiatrie». Les domaines historiques ou juridiques sont également engagés. Au centre de la pièce, une vitrine est consacrée aux dossiers d’enfants placés (cf. encadré). Lettres de pupilles au Tuteur général, dessins d’enfants représentant leur famille et procès-verbaux établis par la Justice de Paix s’offrent au regard du visiteur.
Le paradoxe: entre droit à l’oubli et connaissance historique
Plonger dans les dossiers psychiatriques ou les dossiers d’enfants placés permet de saisir un paradoxe sociétal. Afin de protéger la vie privée, au nom du droit à l’oubli, il faudrait détruire toutes ces données personnelles. Mais pour permettre à des victimes de comprendre ce qui leur est arrivé, pouvoir écrire l’histoire de la psychiatrie vaudoise aux 19 e et 20 e siècles ou préserver un patrimoine artistique inattendu, la conservation de documents contenant des données personnelles est nécessaire.
Prolonger la réflexion
Un cycle de conférences, ouvert gratuitement à toutes et à tous, est organisé en marge de l’exposition. Les séances seront animées par des spécialistes de différents domaines (archivistes, historiens, médecins, historiens de l’art, juristes, préposé à la protection des données, etc.).
Infos pratiques
> «Archives psychiatriques: "faut-il consulter?" Contribution au débat sur la conservation des données personnelles». Exposition aux Archives cantonales vaudoises, rue de la Mouline 32, 1022 Chavannes-près-Renens, jusqu'au 31 décembre 2016: lu-ve: 9-17h, me: 14-19h.
> Entrée libre
> Site des Archives cantonales
> Programme du cycle de conférences