Cet été, Awet, Aman, Ferdaus, Reza, Adrien, Diaite et Fares – d’Érythrée, Afghanistan, Congo, Sénégal et Libye –, accompagnés d’ingénieurs en environnement de la Fondation Actions en faveur de l’environnement (FAFE) ont inlassablement arraché «renouée du Japon», «impatiente glanduleuse», «buddléia de David» et autres «solidages américains». Ces espèces, dites exotiques et envahissantes (voir encadré), sont traquées par la Confédération, les cantons et les communes depuis plusieurs années, car elles menacent les espèces locales et posent des problèmes de santé publique.
Ce projet pilote a été mis en place par l’Établissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), la FAFE et la Division biodiversité et paysage de la Direction générale de l’environnement (DGE-BIODIV).
Allier asile…
«À travers ces programmes d’occupation (voir encadré), les personnes en procédure d’asile mettent un premier pied dans le monde du travail en Suisse», explique Evi Kassimidis, chargée de communication à l’EVAM. La plupart des requérants impliqués ont en effet un permis F, qui donne accès au marché de l’emploi. «Cette occupation leur permet d’exercer une activité qui rythme leur quotidien, de s’intégrer au sein d’une équipe, de reprendre confiance en eux et d’avoir une meilleure estime de leur personne», ajoute Evi Kassimidis. C’est aussi l’occasion pour les requérants d’asile de rencontrer la population locale et de pratiquer le français, précise la porte-parole de l’EVAM.
… et environnement
Les campagnes d’arrachage de ce type ont commencé en 2014, explique Christophe Portier-Fleury, gestionnaire de la nature à la DGE-BIODIV, avec des groupes d’une dizaine de civilistes, au rythme d’actions «coups de poing» d’une semaine sur un site. Après ces interventions relativement lourdes, la place était nette. C’est ainsi qu’est venue l’idée de collaborer avec des migrants et l’EVAM.
Travailler avec des requérants d’asile a impliqué d’autres contraintes, explique Christophe Portier-Fleury. Les migrants doivent retourner dans leur centre d’hébergement à Bussigny chaque soir. Et cette activité ne peut pas prendre plus de 50% de leur temps, car ils doivent chercher du travail, suivre des cours de langue et des modules sur les «us et coutumes ainsi que le fonctionnement de la vie en Suisse», explique Evi Kassimidis. Les trente jours de travail effectifs ont donc été répartis sur quatre mois, à raison de deux jours par semaine.
Bilan
Au total, 27 hectares ont été traités. «On est ravis, c’était incroyable, se réjouit Mathieu Baumann, l’un des trois encadrants de la FAFE. On a eu affaire à des gens très motivés!» Comme l’action s’est déroulée sur plusieurs mois, il a été possible de passer une deuxième fois sur certains sites. Une méthode efficace, car ces espèces poussent très rapidement. «Cela permet d’intervenir pendant les périodes idéales, c’est-à-dire avant la mise en graines. Et pour la plante, il n’y a rien de pire que de se faire arracher plusieurs fois de suite!», explique Christophe Portier Fleury.
Les encadrants de la FAFE relèvent que «des liens indéniables se sont créés entre les requérants», ainsi qu’avec eux. Il y a eu de «nets progrès en français». Enfin une «grande assiduité» a été constatée. Il s’agit pourtant d’un travail fastidieux, explique Christophe Portier-Fleury, car tout doit être fait manuellement et les sites sont parfois difficiles d’accès.
Perspectives
«À la DGE-BIODIV, on est très contents de travailler avec les migrants. Je les conseillerais chaleureusement», souligne Christophe Portier-Fleury. La FAFE et la DGE souhaitent reconduire le projet. Ce modèle d’action est déjà mis en place avec des communes, comme le rappelle Evi Kassimidis. «En 2016, à fin septembre, nous comptions des collaborations avec 17 communes vaudoises. Il y a par exemple eu plusieurs programmes d’assainissement de cours d’eau à Nyon et à Commugny.»