Visiter «Fantastique! Armes et armures dans les mondes imaginaires», c’est un peu se lancer dans une chasse au trésor. L’exposition est dispersée dans trois espaces du château de Morges. Des pictogrammes guident les visiteurs de l’univers du «fer», où l’on navigue entre les épées et armures de Game of Thrones et Harry Potter, à celui du «fer et de la flamme», c’est-à-dire des pirates, pour finir dans le monde contemporain, voire apocalyptique de la «flamme», entre les pistolets et blasters de Star Wars et RoboCop.
«Le but de l’exposition est de mettre en regard les armes du patrimoine et du cinéma, explique Daniel Jaquet, responsable de la médiation culturelle et des recherches scientifiques. En les mélangeant, nous essayons d’atteindre un nouveau public. Les films sont de très bons points d’accroche pour impliquer les gens!» Une manière originale de montrer des armes historiques pour lesquelles il aurait été difficile de susciter de l’intérêt. Le face à face martial est étonnant, instructif, souvent amusant.
Sabres trop longs et armure biscornue
On s’en doute, les créateurs d’armes de cinéma ne respectent pas toujours la réalité historique. «La pure apparence compte beaucoup. Certaines armes de films seraient tout bonnement inutiles», s’amuse Daniel Jaquet. Ainsi les sabres de Jack Sparrow dans Pirates des Caraïbes sont trop longs et seraient peu pratiques pour se battre sur des bateaux. L’arbalète de Kevin Costner dans le film Robin des Bois, comme celles de van Helsing, plus récemment, ne tirerait pas bien loin.
À contre-pied, John Howe, qui a conçu les costumes du Seigneur des anneaux et habite en Suisse, est l’un des premiers à être sensible au patrimoine et chercher à comprendre le maniement des objets qu’il imite. En atteste la cotte de mailles d’Uruk-hai présentée dans le premier espace d’exposition. Parfois, les créateurs s'amusent à sciemment déformer les objets, comme cette armure toute biscornue de la série parodique Kaamelott.
Quand la fiction influence le réel
L’exposition rappelle aussi l’influence du cinéma sur l’imaginaire collectif. Il peut parfois inspirer une pratique existante, rappelle Daniel Jaquet. Par exemple, les réalisateurs de Highlander voulaient un élément visuel qui caractérise le sabre du héros. Une poignée en ivoire, inspirée d’un «kris» indonésien, est ajoutée à l’arme. On trouve depuis dans le commerce des sabres japonais à poignée en ivoire.
Il est parfois difficile de savoir si l’arme est réelle ou fictive, tant les armuriers étaient inventifs. On trouve ainsi dans la section sur les pirates un modèle bien réel de pistolet à quatre canons, dit à «pattes de canard», pratique pour se défendre dans les espaces exigus et qui ne fait pas perdre de temps pour le recharger, qu’on aurait juré imaginé pour un blockbuster.
Le détail qui tue
Une chose est sûre, les réalisateurs aiment que les armes emblématiques de leurs héros et héroïnes aient un petit quelque chose de spécial, un élément visuel à même de les démarquer des épées ou pistolets standards. Des prototypes sont ainsi devenus des stars de cinéma grâce à leur apparence remarquable.
Dans la même veine, les fans de Star Wars auront noté que le sabre laser de Kylo Ren, le méchant de la dernière trilogie, a des gardes sur le côté, absentes sur le modèle traditionnel (mais similaires à celles d’une épée d’estoc «Pantertecher» courante au 16e siècle!). Ce détail extraordinaire arrête bel et bien l’œil, mais rend l’arme non maniable, puisqu’une telle garde «laser» blesserait celui qui manipule l’arme.
Apprentis jedis bienvenus
Le pari de la pop culture est réussi, même avec des moyens limités. Pour des raisons de droits, impossible par exemple d’exposer des images ou des séquences de films. Des dessins et des affiches donnent le change. Et des QR codes à côté des objets permettent de visionner 230 bandes-annonces de films durant la visite. Des pièces originales offertes aux figurants, des copies ou des objets pour les étapes de design préliminaire ont été principalement mis à disposition par un réseau de prêteurs privés.
Un parcours ludique conçu pour les enfants propose entre autres un atelier pour apprendre à manier le sabre laser et dévier les tirs. Les adultes ont aussi le droit de s’y essayer! Et des conférences sont proposées chaque mois.
Dernier secret pour la route: si l’armure de Dark Vador est japonaise, son masque s’inspire d’un masque à gaz de la Seconde Guerre mondiale. Quant au robot C3PO, il ressemble à s’y méprendre à une armure dite «savoyarde» du 17e siècle. Pour voir ce que ça donne, filez au château de Morges!
> «Fantastique. Armes et armures dans les mondes imaginaires». Exposition au château de Morges, jusqu’au 2 décembre: ma-ve: 10-17h, sa-di: 13h30-17h.
> Soirées conférences et visites guidées les derniers vendredis du mois.
> Ateliers de maniement d’armes fantastiques pour les enfants et les classes les premiers mercredis du mois.
> 22 et 23 septembre: Epic festival