Canicule : bien s’informer pour mieux savourer l’été
La période de la veille sanitaire en cas de canicule a commencé le 1er juin et se terminera le 31 août. Que vous soyez au bureau, sur un camion, dans votre jardin, bientôt en montagne ou au bord d’un lagon, l’Unité sécurité et santé au travail (USST) du Service du personnel (SPEV) fait le point sur ce qu’il faut garder à l’esprit durant ces vagues de chaleur.
Même si la canicule commence à devenir plus ou moins courante sous nos latitudes, Antonino Trovato, ingénieur spécialiste en sécurité et santé au travail à l’USST, estime nécessaire d’en donner une définition précise, puisqu’il existe « différents niveaux d’alerte et donc différentes mesures à prendre ». On parle de canicule lorsque les températures journalières et nocturnes sont élevées pendant trois jours consécutifs au moins. Dans ce laps de temps, les températures maximales peuvent être comprises entre 31° et 38 °C et les températures minimales nocturnes entre 17° et 25 °C. « Néanmoins, même quand la chaleur n’atteint pas les critères de canicule, des mesures de prévention restent recommandées » précise Antonino Trovato.
Face aux fortes chaleurs
Témoin du changement climatique en cours, la mesure des températures en Suisse montre bien que c’est depuis les années 1980 que notre climat se réchauffe le plus vite. En ce qui concerne les vagues de chaleurs, elles sont 200 % plus fréquentes et plus intenses depuis 1901. « Je me souviens qu’enfant, nous bénéficiions de ce que l’on appelait des congés de chaleur » raconte Antonino Trovato, qui a retrouvé un règlement scolaire de 1984 le stipulant. Ce n’est pourtant qu’en 2009 que naît le premier Plan canicule cantonal, régulièrement mis à jour depuis lors. En complément, une directive détaille les mesures de prévention en cas de fortes chaleurs ainsi que les recommandations concernant le travail en intérieur ou à l’extérieur.
L’organe de tutelle pour cette question est l’Office du médecin cantonal, à la Direction générale de la santé, lequel décrète s’il y a canicule ou non. Le site officiel vd.ch relaye l’information à l’attention de la population et des collectivités, et l’on trouve sur une page dédiée une série de conseils pour se protéger, des recommandations médicales, des tracts à distribuer pour la prévention, et même une recette maison pour se réhydrater.
« A l’USST, nous jouons d’avantage un rôle d’information, mais si nos correspondants sécurité en éprouvent le besoin, nous pouvons les aider à mettre en œuvre des solutions ».
Ambiance cool au bureau
Du côté professionnel, l’article 20 de la loi travail stipule depuis 1993 que les « travailleurs doivent être protégés contre tout ensoleillement excessif et contre tout rayonnement calorifique ». Grâce à des indicateurs visuels en couleurs, les recommandations du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) en matière de niveaux d’alerte sont éloquentes. D’abord, la chaleur ressentie par le corps humain est plus importante que la température réelle. En cause, le taux d’humidité relative qui augmente la chaleur ressentie par le corps : par exemple 70 à 79% de taux d’humidité l’augmente de 7°C ! Ensuite, l’intensité du travail – que l’on soit assis ou debout, statique ou actif – a une influence. Si l’on parle « zone rouge dès 34° à 36°C dans les bureaux, les premières mesures de précaution techniques et organisationnelles devraient être prises à partir de 28°C » met en garde Antonino Trovato qui évoque des solutions « simples et peu coûteuses ». En première ligne, l’aération et la ventilation des locaux ainsi que l’hydratation régulière (au moins 1,5 litre par jour) sont capitales en cas de forte chaleur. « Dans les bâtiments qui ne sont pas équipés de la climatisation, des ventilateurs sont régulièrement mis en place ». Du côté des parades organisationnelles qui incombent aux responsables, on liste l’aménagement du temps de travail, des temps de pause destinés au rafraîchissement, l’autorisation du télétravail et du port de vêtements plus légers (des habits clairs et amples en coton sont à privilégier) et, bien sûr, la protection prioritaire des personnes sensibles – notamment les femmes enceintes.
Sous le soleil malheureusement
Les personnes travaillant à l’extérieur sont en première ligne et se révèlent davantage exposées aux « coups de chaleur », une hausse excessive de la température corporelle qui peut avoir de graves conséquences, rappelle Antonino Trovato. Et le risque pour la santé augmente à mesure que la température de l’air, le taux d’humidité et le taux d’ensoleillement s’élèvent. Les plus vulnérables sont ceux qui fournissent un effort soutenu ou qui portent des habits de protection, parfois étouffants. A leur attention, le SECO a créé un précieux outil d’appréciation adapté cette fois aux conditions de plein air, « en gros, dans le même esprit que pour le travail de bureau, mais encore plus poussé ». Par exemple, pour une personne effectuant un travail très lourd – comme de l’excavation sur un chantier ou un travail à la hache en forêt – des mesures supplémentaires sont fortement recommandées. Il peut s’agir par exemple de décaler le temps de travail – privilégier les heures les plus fraîches du type 4h-10h et 15h-19h –, aménager des locaux de pause à l’ombre (un « Portakabin » climatisé), allonger les temps de récupération et d’hydratation, ombrager les postes de travail (« une tente bon marché peut suffire ! »). Comme le résume Antonino Trovato, « des mesures faciles, mais qu’il ne faut pas oublier de prendre ». (EB)
« Si l’on doit se reposer à cause de la canicule, la nature aussi »
Cet après-midi de juin, Alain Simon, responsable de l’unité entretien de Sainte-Croix à la Direction générale de la mobilité et des routes (DGMR), est en train de terminer la fauche en plaine avec son équipe. « Là, c’est la température idéale, 11°/12°C… ». Quand on l’interroge sur les dépassements des normales saisonnières, l’homme a un petit sourire. C’est qu’après vingt ans passés dans les remontées mécaniques en moyenne montagne, il raconte comme il a éprouvé le besoin de changer d’air, « lassé de fabriquer de la neige à 1200 m d’altitude ». Le réchauffement ? Que ce soit l’hiver ou l’été, ce n’est pas nouveau pour lui. Et même s’il n’est employé de l’Etat que depuis 2016, il a pu constater une évolution de son travail depuis six ans : « Les canicules reviennent de plus en plus régulièrement, il fait de plus en plus sec ». Pourtant, il estime être chanceux par rapport à certains de ses collègues, puisque les températures maximales dans ce coin du Jura vaudois n’ont pour le moment pas dépassé 33° ou 34°C en plaine et 28° ou 29° en altitude : au-dessus des normales certes, mais rien qui ne l’ait mis en défaut avec son équipe.
« Pour se protéger, on se réfère aux directives, mais aussi à notre bon sens. On essaye de différer les tâches les plus pénibles en cas de vague de chaleur, on s’arrête plus souvent pour faire une pause et boire – la DGMR nous fournit des bouteilles d’eau –, on reste attentif, on en discute entre nous. » Pour cet homme pragmatique, il faut savoir distinguer les choses urgentes liées à la sécurité et le reste dans leur cahier des charges. « Et puis, si on doit se reposer un peu à cause de la canicule, alors la nature aussi… et la fauche peut attendre. »
Déconnecter ? La clé pour éviter la surchauffe !
On a tendance à l’oublier, les coups de soleil ne sont pas les seuls dangers qui nous guettent l’été venu. Parmi les précautions essentielles à prendre – boire régulièrement sans attendre d’avoir soif, se rafraîchir le corps plusieurs fois par jour, éviter les efforts physiques et de sortir aux heures chaudes, se protéger en portant les indispensables chapeau, lunettes et crème solaire avec un indice adapté à son âge et son type de peau –, la déconnexion est l’ultime clé pour passer un été agréable… C’est le point 9 de la Directive technique LPers du Service du personnel de l’État de Vaud : le droit des collaborateurs et collaboratrices à se déconnecter des outils numériques professionnels en dehors des heures de travail. Pour Maria Undurraga, responsable de la réinsertion professionnelle au SPEV, « pouvoir trouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle n’est pas qu’une question de repos, mais aussi de santé sachant que le burn-out, par exemple, peut conduire à des manifestations physiques comme l’eczéma, les ulcères, les tensions discales ou cervicales… » Si la frontière entre travail et vie privée est de plus en plus ténue avec le développement des outils numériques, elle constate que le phénomène s’est aggravé depuis l’usage des smartphones, la pandémie et la généralisation du télétravail. Malgré une interpellation au Conseil d’Etat en 2019 à ce sujet, il n’existe pas de base légale autre que la loi sur le travail qui délimite un volume horaire. Un rappel? « Ne pas travailler entre 20h et 6h, qui sont considérés comme des horaires de nuit (art. 122 RLPers). Et, bien sûr, ne pas travailler pendant les week-ends et les vacances, qui sont faits pour se reposer ! » Pouvoir déconnecter de son métier : c’est aussi ça le bien-être au travail.
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