Photo: BIC (FA)
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Agnès Roethlisberger, la dame du lac de Neuchâtel

Agnès Roethlisberger, habitante d’Yvonand, voue un attachement profond au lac de Neuchâtel. Elle se baigne toute l’année dans ses eaux. Portrait d’une enseignante de français et de latin le jour et naïade le soir.

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3 minutes de lecturePublié le 29 janv. 2021

C’est en voyant un homme nager en décembre dans la Méditerranée à Athènes que lui est venue l’envie de tels bains quotidiens. « Cela faisait longtemps que j’en rêvais de me baigner chaque jour dans le lac, peu importe le temps. Athènes a été un vrai déclic pour ce projet », se souvient Agnès Roethlisberger.Déjà à l’adolescence, cette amoureuse du lac aimait se baigner à la belle saison, le soir. «Cette partie du lac, à Yvonand, est très sauvage et orientée à l’ouest. Avec le coucher du soleil, c’est magnifique.»

Mais se baigner au lac été comme hiver est un défi pour le corps. C’est en 2015 qu’elle s’est jetée à l’eau. «Ce premier hiver, je pensais nécessaire d’y aller absolument tous les jours pour habituer mon corps.» Cela tombait bien, car pour la première fois de sa carrière d’enseignante, Agnès Roethlisberger était confrontée à des problèmes relationnels avec une classe. «Il y a eu à ce moment-là une importante remise en question professionnelle, confie-t-elle. En me baignant tous les jours durant cet hiver, à un moment professionnellement difficile pour moi, j’en ressortais lavée de mes soucis, apaisée et ressourcée. Ces moments de baignades en fin de journée m’ont permis de puiser de la force pour aller de l’avant.» Cette première année de bains quotidiens a été partagée sur Facebook : «Lors de chaque baignade, je prenais des photos avec mon téléphone. J’écrivais ensuite un texte en lien avec les images du jour. Je postais le tout pour faire part de cette expérience.»

Lorsqu’elle décrit l’expérience vivifiante de rentrer dans une eau à 5°, la dame du lac explique : «Je me baigne d’habitude avec un bonnet pour perdre le moins de chaleur possible et ne me mouille jamais la tête. Je fais environ dix brasses dans le lac et dix brasses vers la rive avant de sortir. En entrant dans l’eau, je cherche à être en harmonie avec le lac et la nature environnante, il n’y a aucune violence. Je me concentre sur la caresse de l’eau sur mon corps et ne ressens ainsi pas le froid. J’ai pu transformer la sensation difficile d’entrer dans l’eau froide en une expérience physiquement agréable et douce.» Et depuis, adieu le rhume ! «Je suis devenue beaucoup moins sensible au froid, note la baigneuse. J’ai essayé la cryothérapie. J’aime moins, il me manque l’environnement naturel. Pour moi, c’est juste une expérience de choc thermique en maillot de bain.»

«Le contact avec l’eau est une expérience très douce et je reste à l’écoute de mon corps. En revanche, c’est vrai que pour rassurer mon entourage, je nage où j’ai pied.»

Agnès RoethlisbergerEnseignante de français et de latin le jour et naïade le soir
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Quand on lui demande si elle ne redoute pas l’hypothermie, la nageuse répond : «Vraiment pas. Le contact avec l’eau est une expérience très douce et je reste à l’écoute de mon corps. En revanche, c’est vrai que pour rassurer mon entourage, je nage où j’ai pied.» Et ce n’est pas un lac gelé qui va l’arrêter. «Il m’est arrivé de me baigner alors que les vagues du lac étaient figées dans la glace par la bise. Exceptionnellement, mon mari m’a accompagnée cette fois-là. D’habitude je me baigne seule et ai toujours un thermomètre avec moi. L’eau n’est jamais descendue en dessous de 4 degrés.»

Bien que se baignant maintenant trois à quatre fois par semaine, pour la nageuse, le plus dur est d’habituer les mains et les pieds au contact de l’eau froide. «Quand on ressort, on a le corps tout rouge et une bonne débattue, comme on dit dans le canton de Vaud.»

De cette expérience revigorante, Agnès Roethlisberger  retire force, vigueur et apaisement. Depuis sa première année de bains, l’enseignante s’est formée à la méditation de pleine conscience. Elle anime des groupes de jeunes pour les aider à gérer émotions et stress. «Avant, j’étais une personne frileuse, je n’aimais vraiment pas le froid. Mes baignades m’ont aidée à prendre conscience de mes ressources pour gérer quelque chose de difficile pour moi.» L’enseignante a d’ailleurs affiché la maxime c’est possible sur une fenêtre de sa classe. «Avec cette phrase, je souhaite donner de l’espoir et de l’optimisme à mes élèves, qui peuvent vivre des choses difficiles à l’adolescence. J’aimerais partager avec eux tout ce que mes baignades m’apportent. Leur montrer que l’être humain est plein de force et de ressources, qu’il ne faut pas avoir peur de vivre les expériences que la vie peut nous imposer. On peut se faire confiance, dans ces moments-là » (MD)

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