Dessin: un distributeur automatique vide ne contient plus qu'un circuit imprimé. L'affichage indique "Rupture de stock".
La crise sanitaire aggrave les problèmes d’approvisionnement en composants informatiques, entre autres. | Image: MG (BIC)
Numérique

Quand pandémie rime avec pénurie

Aggravés par la crise sanitaire, les problèmes d’approvisionnement en semi-conducteurs rencontrés partout dans le monde touchent aussi de plein fouet les services de l’État. La Direction générale du numérique et des systèmes d’information – qui commande et met à disposition les composants informatiques dont l’administration cantonale a besoin pour réaliser ses activités – doit jongler avec d’importants retards dans les livraisons de matériel.

La crise sanitaire aggrave les problèmes d’approvisionnement en composants informatiques, entre autres. | Image: MG (BIC)
Publié le 18 févr. 2022

« J’ai commandé un nouvel iPhone et un double écran et j’attends toujours ! » Très souvent confrontée à ce type d’interpellations toujours plus pressantes, la Direction générale du numérique et des systèmes d’information (DGNSI) n’est pour rien dans les retards de livraison, fruit d’une pénurie mondiale de semi-conducteurs, qui met à mal depuis plusieurs mois l’ensemble du marché des composants électroniques.

« En contact presque quotidien avec nos différents fournisseurs, notre Centre logistique doit faire un travail d’équilibrisme en raison de cette pénurie générale et des retards de livraison qui en découlent. D’un côté, “surstocker” nécessite de la place et engendre des coûts importants, et de l’autre, travailler en flux tendu induit des risques de manque de fournitures », détaille Pierre-Yves Chavan, directeur Environnement de travail numérique à la DGNSI, avant d’ajouter : « La crise sanitaire a sonné le glas d’un système mondial qui était déjà au bord de la rupture. »

« La crise sanitaire a sonné le glas d’un système mondial qui était déjà au bord de la rupture. »

Pierre-Yves ChavanDirecteur Environnement de travail numérique à la DGNSI

Un retard général

Pour bien comprendre la situation, il faut savoir que les semi-connecteurs qui sont aujourd’hui impactés sont utilisés pour la fabrication de tous les composants électroniques des objets que nous utilisons au quotidien. Bien que leur production reste élevée (plus de 1000 milliards de puces électroniques sont produites par année), celle-ci ne suffit plus à répondre à la demande. Les semi-conducteurs sont présents partout autour de nous : smartphone, téléviseur, ordinateur, électroménager, montre connectée ou voiture.

La pandémie, facteur aggravant

Avec la progression fulgurante du télétravail, la pandémie a provoqué une augmentation massive de la demande en matériel informatique. Rappelons que la majorité des appareils électroniques du quotidien ne sont pas fabriqués en Suisse et doivent donc y être acheminés. La crise sanitaire a eu des conséquences sur la chaîne d’approvisionnement et le transport de marchandises par voie maritime (80 % du trafic mondial en volume). Il existe dans le monde environ 25 millions de porte-conteneurs qui naviguent sur les océans et sur les mers, transportant des millions de tonnes de marchandises, dans un système complexe, qui doit conjuguer les capacités des ports maritimes, le réseau ferroviaire ainsi que le réseau routier.

Accompagnée de différentes restrictions, confinements et quarantaines, la crise sanitaire a indéniablement ralenti l’activité des ports maritimes (la Chine a une politique de quarantaine très stricte, confinant des villes entières si besoin après l’apparition de quelques cas seulement), provoquant une réaction en chaîne et augmentant les prix et les tarifs. À titre d’exemple, dans la décennie qui a précédé la pandémie, expédier un conteneur depuis la Chine vers le port de Los Angeles (le plus grand des États-Unis) coûtait en moyenne 2000 dollars, alors qu’actuellement, le tarif se monte à environ 11 000 dollars pour la même prestation. « On se souvient tous aussi du porte-conteneurs qui a bloqué le canal de Suez pendant 6 jours au mois de mars dernier, provoquant un embouteillage de 425 navires transportant 26 millions de tonnes de marchandise. La valeur journalière des marchandises bloquées a été estimée à 9 milliards de dollars », rappelle le directeur Environnement de travail numérique à la DGNSI.

Patience, patience…

« Il ne faut pas s’attendre à un retour à la normale avant plusieurs semaines ou plusieurs mois, voire seulement dans le courant de l’année 2023 », prédisent les professionnels de la DGNSI. Pour le consommateur final, cela provoque une grosse attente, doublée d’une augmentation des prix à l’achat. Pour les collaboratrices et collaborateurs de l’administration, cela nécessite d’être patient et aussi de devoir se contenter du matériel existant un peu plus longtemps…

« La DGNSI s’engage cependant à faire son maximum pour honorer les commandes dans les temps, mais il faut malheureusement accepter que certains composants ne soient momentanément plus disponibles », conclut Pierre-Yves Chavan. (MHJ)

Dans les autres secteurs d’approvisionnement de l’État

L’informatique et la téléphonie ne constituent qu’une partie des fournitures de l’État, qui a confié l’ensemble des autres secteurs d’approvisionnement à la Direction des achats et de la logistique (DAL). Directeur de cette entité rattachée à la Direction générale des immeubles et du patrimoine, Antonio Guarino confirme que la pénurie existe dans des secteurs spécifiques, comme les périphériques électroniques, en lien avec la problématique des semi-conducteurs déjà évoquée.

La filière du papier est également fortement impactée. La progression incessante du commerce en ligne entraîne une consommation massive de cellulose destinée aux emballages, rendant ainsi difficile et incertain l’approvisionnement en papier d’écriture ou d’impression. « Mais c’est surtout l’augmentation de 10 à 20% des prix, précise le directeur, conséquence directe de la flambée politico-spéculative du marché du bois, qui caractérise la crise actuelle », souligne le directeur.

Les autres secteurs d’approvisionnement sont moins touchés pour l’instant dans leur disponibilité, tout en suivant le renchérissement global des matières premières et des coûts de transport à l’échelon mondial. À l’échelle de l’État de Vaud, Antonio Guarino tient à rassurer les utilisatrices et utilisateurs : « La DAL prend toutes les mesures possibles en matière d’anticipation de commandes, de réservations et de stockages supplémentaires pour garantir au mieux le niveau des fournitures et éviter des ruptures de stock. Ces dernières pourraient toutefois survenir de manière ponctuelle dès le second semestre 2022. » (ODZ)

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