Les Archives cantonales sur de nouveaux rails
Delphine Friedmann entrait en fonction il y a un an presque, jour pour jour, à la tête des Archives cantonales. Bilan de l’année écoulée.
Après 24 ans sous la direction de Gilbert Coutaz, les Archives cantonales entrent dans une nouvelle ère, alors qu’elles doivent répondre à de nouveaux enjeux, sous la conduite de Delphine Friedmann, directrice de l’institution depuis le 1er juillet 2019.
Vous occupez la fonction de directrice des Archives cantonales depuis un an. Quel est votre bilan à ce stade?
J’ai commencé par observer le fonctionnement de l’institution afin d’en comprendre les rouages. Je me suis assez vite rendu compte que certaines choses devaient être modifiées, par exemple en matière de gestion du personnel, de l’information ou de l’image que nous donnons à l’extérieur. J’ai l’impression de mettre progressivement les Archives cantonales sur de nouveaux rails, à l’interne, mais également vis-à-vis de l’administration cantonale.
De quelle manière?
Nous avons modifié le système interne de classement de l’information, revu notre politique d’évaluation et de gestion des fonds privés ; nous avons créé une identité visuelle de manière à renouveler notre image vis-à-vis de l’extérieur et proposons une nouvelle petite exposition. Nous commençons à voir apparaître les fruits d’une nouvelle façon de travailler, une nouvelle dynamique voit le jour. Ce ne sont pas d’énormes changements pour l’heure, mais c’est déjà différent.
Parmi vos missions, il est notamment question de la mise en œuvre de la politique de gouvernance documentaire voulue par les autorités cantonales. En quoi consiste-t-elle?
Elle consiste essentiellement à maîtriser le cycle de vie de la documentation produite et reçue par l’État dans le cadre de ses activités, et à développer des outils permettant de gérer et conserver les données numériques de façon fiable et pérenne sur l’ensemble de ce cycle. Cela signifie notamment que nous devons déterminer comment traiter l’information au fil du temps, durant la période de production, de conservation temporaire puis d’archivage historique. À partir du moment où nous arriverons à gérer adéquatement les moments-clés de passage entre ces différentes étapes, et identifier à quel moment quelles données peuvent être supprimées ou doivent être versées aux Archives cantonales pour être conservées à long terme et mises à disposition du public, nous aurons fait un grand pas en avant dans la maîtrise de l’information. C’est un projet qui absorbe en ce moment énormément de temps et d’énergie aux Archives cantonales, avec la Direction générale du numérique et des systèmes d’information (DGNSI) notamment. Mais c’est passionnant! L’idée est d’arriver à maîtriser le flux documentaire de manière beaucoup plus précise, fluide et adéquate que ce que nous avons pu faire jusqu’à présent.
On parle aujourd’hui beaucoup de numérisation et de dématérialisation. Quels sont les enjeux et les défis dans le domaine des archives?
Il faut d’abord distinguer la dématérialisation de documents papier, analogiques, pour des questions d’accès et de préservation, de la dématérialisation des processus, qui s’inscrit davantage dans une vision de «cyberadministration». Le premier défi est de clarifier de quel type de dématérialisation on parle, dans quel objectif et quel contexte elle intervient, afin de définir quels outils développer. La dématérialisation de l’information nécessite de tenir compte de paramètres différents selon qu’elle a pour but de permettre un accès facilité, rapidement et à large échelle, ou qu’elle s’inscrit dans une politique de conservation pérenne, à très long terme. Mais de toute façon, des questions de format, de stockage et d’accès se posent. Aujourd’hui, les projets sont multiples et il faut développer rapidement des outils qui répondent à ces différentes questions. Les Archives cantonales mènent des projets de rétronumérisation de sources analogiques pour en faciliter l’accès et la diffusion, mais l’enjeu majeur aujourd’hui consiste à développer des solutions pour parvenir à gérer les masses de données produites sous format numérique et à pérenniser celles qui doivent l’être.
Vous évoquiez aussi des questions d’accès et de formats numériques.
Les dossiers «majeurs» doivent rester lisibles au fil du temps. Certains documents créés en format numérique il y a 20 ou 30 ans ne sont déjà plus lisibles, alors que nous pouvons encore lire des écrits du 10e siècle. Nous avons encore un sacré chemin à parcourir avant de pouvoir garantir qu’un document créé aujourd’hui sera encore lisible et donc accessible en 2100. Et je ne vous parle même pas de l’an 3000! (DT)
Vent frais aux Archives
Rouvertes au public depuis le 8 juin, les Archives cantonales vaudoises (ACV) proposent plusieurs nouveautés aux visiteurs. À commencer par une nouvelle exposition, à voir à l’accueil, mettant en perspective des cartes du territoire en regard d’images aériennes ainsi que différents types de plans.
Des documents souvent demandés, comme le souligne l’archiviste Acacio Calisto. «Après la généalogie, la cartographie et le cadastre sont parmi les documents les plus recherchés par le public».
Comme on peut également le voir sur l’affiche de l’exposition, les ACV se sont depuis peu dotées d’une nouvelle identité visuelle. «Toute la signalétique a été repensée pour offrir davantage de clarté aux visiteurs. Elle reprend maintenant partout notre logo, conçu sur la base de nos initiales, avec lequel nous pouvons jouer sur différents supports», souligne l’archiviste. À l’horizontale, par exemple tel qu’il est proposé sur l’affiche, il suggère par exemple une ligne du temps, si précieux aux ACV. «C’est une sorte de curseur, de représentation du temps. Il est en parfaite adéquation avec notre mission de conserver le passé, mais aussi d’envisager le futur et ce que nous allons garder.»
Smapshot, deuxième vague
Toujours à l’entrée, sur ordinateur, les visiteurs peuvent aussi plonger dans le grand projet de machine à remonter le temps participative Smapshot, lancé l’an dernier. Il s’agit de photographies aériennes issues du fonds d’archives de l’Aéroport de Lausanne, que les internautes ont eu pour mission de géolocaliser. Un véritable succès selon Acacio Calisto.
L’opération sera par ailleurs reconduite dès mardi 30 juin, avec un second lot d’images, après une conférence à laquelle participeront plusieurs concepteurs de la Haute école d’ingénierie et de gestion du canton de Vaud (HEIG-VD), qui mène le projet. Une conférence à suivre en direct sur la chaîne YouTube de la Haute école, au cours de laquelle les internautes pourront aussi bien prendre connaissance de Smapshot et de son fonctionnement que poser leurs questions ou partager leurs observations via chat. (DT)
Lien vers la conférence Smapshot, à suivre en direct mardi 30 juin à 16 h