Les multiples vies professionnelles de Frédéric Oguey
Après avoir dû tirer un trait sur sa carrière de boulanger-pâtissier en raison d’une allergie à la farine, ce Vaudois a pu se réorienter grâce à des mesures de soutien de l’AI. A 39 ans, il vient d’obtenir son CFC d’agent d’exploitation, option voirie. Portrait.
Quel est le comble pour un boulanger? D’être allergique à la farine! Ce qui, de prime abord, aurait pu ressembler à une banale devinette trouvée dans un emballage de Carambar aura surtout été une triste réalité dans la vie de Frédéric Oguey. «Au milieu de mon apprentissage de boulanger-pâtissier, j’ai commencé à éternuer et à avoir le nez qui coule, se rappelle-t-il au moment d’évoquer cette «mauvaise blague». Rien de bien grave au début, mais la situation s’est progressivement dégradée et les symptômes se sont amplifiés.» Le Vaudois consulte alors un allergologue, qui confirme une allergie à la farine. Ne sachant trop vers quel autre métier se tourner, Frédéric Oguey décide de continuer à jouer de la maryse et du fouet. Mais au fil des années, il développe de l’asthme. «J’entendais des sifflements quand je respirais et j’étais constamment très fatigué», se remémore-t-il. Après 16 années passées devant le four, il décide de raccrocher définitivement son tablier. «Cela a été un crève-cœur, car j’aimais beaucoup ce que je faisais, explique-t-il. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai repoussé l’échéance au maximum.» Contraint et forcé de quitter les paillasses en inox, il se reconvertit sur le tard en aide-charpentier. «Mon oncle m’a engagé comme manœuvre dans son entreprise. Cela m’a bien dépanné durant cinq ans, mais je n’arrivais pas à m’épanouir pleinement», concède celui qui pratique le trail, le tir sportif et la pêche.
«Au milieu de mon apprentissage de boulanger-pâtissier, j’ai commencé à éternuer et à avoir le nez qui coule. Rien de grave au début, mais la situation s’est progressivement dégradée et les symptômes se sont amplifiés.»
Grâce aux mesures de soutien de l’AI
Un jour, lors d’une visite de routine chez son allergologue, ce dernier évoque la possibilité d’obtenir des mesures de soutien de l’assurance-invalidité (AI). Dans la foulée, Frédéric Oguey fait une demande. Après examen de son dossier médical, l’AI décide de lui accorder son aide, étant donné qu’il a dû quitter la profession pour laquelle il avait été formé suite à des soucis de santé.
«J’ai d’abord bénéficié d’un coaching professionnel personnalisé, afin de définir l’orientation qui me conviendrait le mieux, souligne cet habitant du Sépey, dans la commune d’Ormont-Dessous. Il en est ressorti qu’un métier d’extérieur serait idéal pour moi.»
Un vaste champ des possibles s’ouvre alors à lui. Après un stage à la Direction générale de l’environnement, à Aigle, en tant qu’agent d’exploitation, option voirie, il est convaincu que c’est la voie à suivre. La chance lui sourit (enfin) : il se voit proposer un contrat d’apprentissage.
« C’est une fonction très diversifiée, qui me correspond bien. D’autant plus que, durant mon jour de cours hebdomadaire, nous avons aussi appris la conciergerie, qui comprend aussi bien l’entretien du bâtiment (chaudière, ventilation, etc.) que celui du gazon »
Les jours passés sur le terrain, quant à eux, l’on conduit, au printemps et en automne, à nettoyer les petits canaux de la plaine du Rhône qui drainent les champs pour que la terre et les feuilles ne causent pas d’inondations, à faire les foins manuellement le long du Rhône en été. En hiver, il s’agissait d’élaguer des branches le long des cours d’eau et, parfois, d’abattre des arbres marqués par le garde forestier, puis de les évacuer. « Je suis conscient de la chance qui m’a été donnée de pouvoir me former une seconde fois, confie Frédéric Oguey, reconnaissant. Lors de ces trois années de formation, l’AI m’a en effet octroyé un salaire minimum qui m’a permis de couvrir mes charges. »
Un couteau suisse professionnel
Mais, fin juillet, ce droit est tombé. Non pas comme un couperet, mais comme une victoire. L’aide financière dont il a bénéficié s’est terminée en même temps que sa formation, auréolée d’un second Certificat fédéral de capacité. À 39 ans, il peut aujourd’hui voir le futur avec sérénité, puisqu’il a été embauché en date du 1er août en tant qu’employé communal à la voirie des Diablerets. Son cahier des charges, qui tient de l’inventaire à la Prévert, correspond pleinement à ses attentes : entretien du gazon et des chemins pédestres, déneigement en hiver, remplacement de la personne qui gère et nettoie la salle communale, et on en passe. «Aux cours, on nous disait que nous serions les couteaux suisses des professionnels. Cela se confirme, ce qui me ravit.» Désormais, la blague du boulanger allergique, même si on s’abstiendra de la lui faire, pourrait même lui arracher un sourire, tant son nouvel avenir professionnel le réjouit. (FR)