Dessin: une femme assise devant son ordinateur semble avoir des pensées moroses.
La conciliation parfois difficile entre vie privée et vie professionnelle est source de stress. Illustration l SPEV
Santé et sécurité au travail

Rentrée: renouer avec le stress...

Après les vacances, synonymes de déconnexion, la reprise du travail n’est pas toujours aisée et le stress est bien souvent au rendez-vous. Parmi les facteurs identifiés par les professionnels du centre de compétences Gestion de la santé en entreprise du Service du personnel de l’État de Vaud : la difficile conciliation entre vie privée et vie professionnelle.

La conciliation parfois difficile entre vie privée et vie professionnelle est source de stress. Illustration l SPEV
4 minutes de lecturePublié le 16 sept. 2022

Le concept de vacances réussies ? Pas d’horaires, assurément. Et que ce soit à l’école ou au travail, la rentrée nous fait repasser à une cadence plus rythmée, voire carrément stressante. Comme le résume Antonino Trovato, ingénieur spécialiste en sécurité et santé au travail, «il faut se remettre dans le bain: reprendre le rythme effréné, les embouteillages, courir à gauche et à droite, jongler entre les agendas des enfants, l’agenda personnel et celui de la famille». Pour certaines personnes, cette remise en route est aussi l’occasion de s’interroger sur ses choix de vie, sur ses désirs fondamentaux: une véritable quête de sens qui est au cœur du bien-être au travail, au coude à coude avec les liens que l’on arrive à nouer dans le cadre professionnel et le confort. Le confort ? «Il passe notamment par l’aménagement des horaires et de l’environnement, pour essayer de concilier au mieux vie privée et vie professionnelle», explique Maria Undurraga, responsable de la réinsertion professionnelle. «Sans ce confort, il est très facile de se retrouver dans une situation de souffrance au travail et ceci se ressent fortement lors des rentrées. Il est très intéressant de noter d’ailleurs que le risque de burn out est plus marqué après les vacances qu’à d’autres moments de l’année.»

«Sans l'aménagement des horaires et de l'environnement de travail, il est facile de se retrouver dans une situation de souffrance au travail. Ceci se ressent fortement lors des rentrées. D'ailleurs, le risque de burn out est plus marqué après les vacances qu’à d’autres moments de l’année.»

Maria UndurragaResponsable de la réinsertion professionnelle

Les clés pour reprendre en douceur

Comme le rappelle avec pragmatisme Antonino Trovato, la durée moyenne pour apprivoiser un changement est de six semaines. «Repris par la frénésie du quotidien, nous oublions souvent que notre corps, comme notre esprit, ont besoin de temps pour apprivoiser un nouveau rythme», explique-t-il. Avant tout, le spécialiste conseille aux collaboratrices et aux collaborateurs de se fixer des objectifs précis, mais pas trop nombreux. «Reprendre le chemin du bureau avec la résolution d'être à 120% n'est pas toujours le meilleur moyen d'être efficace, met-il en garde. Et les temps de pause à la machine à café, entouré de collègues avec qui l’on peut parler d’autre chose que du travail, sont des moments très importants». Le spécialiste conseille enfin de maintenir ses bonnes résolutions comme l'activité sportive souvent développée pendant les vacances. Mais attention, «pas à un niveau trop élevé, nuance-t-il. Il ne faut pas commencer une activité qui va prendre trop de temps, qui risque d'accélérer l'effet de la rentrée en accroissant la pression du temps».
Bref, qu’il s’agisse d’une pause de 15 minutes ou d’un break de 24 heures, l'idée est vraiment de continuer à prendre du temps pour soi, à savoir créer un «moment de vacances, un temps de bien-être». Pour cela, l’administration cantonale n’est pas avare en solutions : modèles de travail flexibles et aménagements du temps de travail, annualisation du temps de travail, télétravail, possibilité de congés divers, etc.

«Reprendre le chemin du bureau avec la résolution d'être à 120% n'est pas toujours le meilleur moyen d'être efficace. Et les temps de pause à la machine à café, entouré de collègues avec qui l’on peut parler d’autre chose que du travail, sont des moments très importants».

Antonino TrovatoIngénieur spécialiste en sécurité et santé au travail

Concilier vie privée et vie professionnelle

Introduit en 2013 dans la loi sur le personnel de l’État (LPers) afin de concilier vie de famille et vie professionnelle, le télétravail a connu depuis la crise sanitaire un boom sans précédent. S’il a permis à beaucoup de réduire le stress et l’anxiété —en s’évitant notamment certains trajets aux heures de pointe —, il a aussi révélé quelques failles. Au centre de compétences Gestion de la santé en entreprise (GSE) du SPEV, on n’est pas dupe: «Il suffit de penser à ces personnes qui télétravaillent, même malades, n’osant pas poser d’arrêt. Ou celles qui, en arrêt maladie, travaillent quand même, histoire de ne pas prendre de retard…».

«Pouvoir trouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle n’est pas qu’une question de repos, mais aussi de santé»

Maria UndurragaResponsable de la réinsertion professionnelle

Pourtant, le point 9 de la directive technique LPers sur le télétravail rappelle bien le droit des collaborateurs et collaboratrices à se déconnecter des outils numériques professionnels en dehors des heures de travail. Pour Maria Undurraga, «pouvoir trouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle n’est pas qu’une question de repos, mais aussi de santé» (voir ci-dessous). Malgré une interpellation du Grand Conseil en 2019 à ce sujet, il n’existe pas de base légale autre que la loi sur le travail qui délimite un volume horaire. Mais pour les situations «où une disponibilité hors du temps de travail est demandée, comme un service de piquet par exemple, des dispositions en règlent les différents aspects, notamment en matière de congé compensatoire» rappelle Antonino Trovato. Autre rappel non superflu : «Ne pas travailler entre 20 h et 6 h, qui sont considérés comme des horaires de nuit (art. 122 RLPers) » insiste Maria Undurraga. (EB)

Reconnaître le stress au travail

Responsable de souffrance au travail, de burn out et même de maladies cardiovasculaires ou de dépendances toxicologiques, le stress est le véritable fléau de notre temps. Reconnu comme risque professionnel, «au même titre que les risques chimiques et biologiques», il figure aujourd’hui en pole position des risques psychosociaux au sein de l’entreprise, avec le harcèlement et les violences.

Si l’on sait bien qu’il existe un bon stress (une réaction physiologique de l’organisme pour faire face à une menace ou à un événement imprévu), le mauvais stress traduit un déséquilibre entre ce qui est exigé d’un individu et les ressources dont il dispose pour y répondre. Et si l’on est en mesure de gérer la pression de manière ponctuelle, on sait que des pressions externes intenses et chroniques mettent en place des mécanismes métaboliques qui conduisent notre organisme à épuiser ses ressources.

Chacun sa «stressabilité»

Face à un stress au travail (le bruit ou la chaleur, des délais courts, la complexité d’une tâche, des horaires contraignants, des rapports sociaux compliqués ou un changement de situation, comme un déménagement), nous ne sommes pas toutes et tous égaux : capacité de résilience, robustesse, faculté à prendre du recul ou s’ouvrir au changement… C’est ce que l’on nomme dans le jargon des ressources humaines notre « stressabilité », soit notre manière d’y répondre. Et la bonne nouvelle, c’est que s’il est souvent difficile de supprimer la source de stress, on peut y travailler de manière individuelle.

Réduire son stress

Parmi les pistes pour diminuer notre réponse au stress, Maria Undurraga énumère trois grands paliers. D’abord, se connaître. « Quels sont nos biais cognitifs, nos croyances, nos valeurs, nos préférences, nos aversions ? Au fil du temps et de l’expérience, on perçoit mieux nos capacités à gérer tel ou tel stress. » Fort de ces informations intimes, et lorsque l’on est au cœur du stress, il faut essayer de « savoir reconnaître quand les émotions montent et y répondre. Par exemple par la respiration, la cohérence cardiaque ou la communication non violente ». Enfin, si cet arsenal maison était insuffisant, il convient évidemment de demander de l’aide. L’équipe GSE et Unisanté dispensent de précieux conseils en matière de soft skills, ces « compétences douces à maîtriser en entreprise » comme la confiance, l’empathie ou justement, la gestion du stress. Elle peut également vous accompagner pour mettre en place des mesures visant à identifier et prévenir un risque de burn out. (EB)
 

Concilier travail et vie privée: creuser la question

La conciliation entre vie professionnelle et vie familiale figure parmi les priorités politiques du Conseil fédéral. Aussi le Secrétariat d’État à l’économie se mobilise-t-il pour offrir des conditions-cadres de qualité en lançant des projets d’information et de sensibilisation et en diffusant les bonnes pratiques au sein des milieux économiques et des administrations publiques sur le lien suivant : www.travailetfamille.admin.ch

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