portrait de Carole Martin
Carole Martin, cheffe de Statistique Vaud : «Notre objectif est de comprendre les réalités vaudoises». Photo | ARC-Sieber
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Donner de la chair et de la vie aux chiffres

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le canton de Vaud (sans jamais oser le demander) est recensé par Statistique Vaud. Depuis 1971, le travail de cet office constitue une source de données inestimables et passionnantes sur la population vaudoise, sa santé économique, bien sûr, mais aussi sa vie privée et professionnelle, ses habitudes, son habitat ou encore ses espérances. Carole Martin lève le voile sur les activités du service qu’elle dirige.

Carole Martin, cheffe de Statistique Vaud : «Notre objectif est de comprendre les réalités vaudoises». Photo | ARC-Sieber
6 minutes de lecturePublié le 04 juil. 2023

On en parle rarement, il est discret, et pourtant : il s’agit probablement de l’un des services les plus stratégiques de l’État de Vaud, dont les nombreuses études (et publications) sont très fréquemment reprises par les médias. Car la mission de Statistique Vaud (StatVD) – anciennement l’Office cantonal de statistique (1971 – 1981) puis le Service cantonal de recherche et d’information statistique (1981 – 2012) – est de scruter, scanner et étudier tout ce qui touche de près ou de loin aux activités et à la vie des Vaudois. En se basant sur de multiples statistiques et de savants calculs, elle produit à intervalles réguliers un arrêt sur image du canton, de ses mouvements démographiques, ses tendances économiques et sociales, ses surfaces agricoles ou encore du nombre de ses logements vacants.

«Au fil du temps, nous nous sommes ouverts à pratiquement tous les domaines d’action de l’État pour disposer de données pertinentes et objectives sur cette réalité vaudoise.»

Carole MartinCheffe de Statistique Vaud

Comme l’explique Carole Martin, l’objectif de StatVD est de «comprendre les réalités vaudoises dans leurs différentes dimensions et participer ainsi au débat démocratique. Il est vrai qu’à ses débuts, l’Office cantonal de la statistique était plutôt focalisé sur l'économie et la démographie. Au fil du temps, nous nous sommes diversifiés en nous ouvrant à pratiquement tous les domaines d’action de l’État pour disposer de données pertinentes et objectives sur cette réalité vaudoise.» Forte de quoi, l’équipe de Statistique Vaud s’est également étoffée, accueillant une trentaine de collaborateurs : «Les profils sont aussi variés que nos missions sont multidisciplinaires : on y trouve des personnes capables de collecter les informations et d’autres rompues à leur analyse; nous avons également des profils de statisticiens, de démographes, de géographes, de mathématiciens ou encore des économistes.»

Savoir poser les bonnes questions

Qui dit statistique dit d’abord collecte d’informations, pour ne pas dire de données. «Dans le cas des enquêtes, nous commençons par établir un questionnaire, détaille Carole Martin, grâce auquel nous allons pouvoir déterminer des indicateurs. Cela peut paraître évident, mais il est fondamental de bien savoir ce que l’on cherche pour poser les bonnes questions.» Ensuite, avant le premier lancement, les équipes de Statistique Vaud procèdent à une enquête pilote pour déterminer si le questionnaire fonctionne «Cela nous permet de vérifier sa pertinence et de l’ajuster si besoin avant de l’envoyer directement aux répondants concernés par l’enquête.»

Les répondants de Statistique Vaud sont la plupart du temps des entreprises ou des services communaux ou cantonaux. «Les gens n’aiment plus trop être embêtés par des sondages. Aussi, nous limitons au maximum les enquêtes directes auprès de la population. En premier recours, nous utilisons des données déjà en main de l’administration», qui seront soigneusement vérifiées. L'objectif étant ici de pouvoir contribuer à des prises de décision basées sur des faits avérés.

Contribuer à la prise de décision

Disposer de nombreuses sources de données permet aux statisticiens d’effectuer des analyses transversales, mais également des croisements entre différentes sources. «À titre d’exemple, si l’on veut s’intéresser à l'activité professionnelle des femmes, on peut aller chercher des informations à la fois dans les données sur la population active, mais aussi dans celles sur l'accueil de jour des enfants et une myriade de sources complémentaires.» De la même manière, le croisement de données de différentes sources permet par exemple d’étudier les parcours scolaires ou les parcours de soin. Pour des questions de protection des données, ces croisements ne servent jamais à identifier des personnes, mais bien à comprendre des phénomènes en cours permettant notamment d’adapter les politiques publiques afin par exemple de limiter les redoublements ou les hospitalisations. Comme l’explique Carole Martin, «les perspectives démographiques, scolaires ou hospitalières, évaluant le nombre d'habitants, d’élèves ou de lits d’hôpitaux nécessaires dans le futur, permettent quant à elles de calibrer les infrastructures.»

Se demander comment la société va évoluer

Depuis 2016, Statistique Vaud s’est vu confier la mission de réaliser des analyses prospectives, dans le but d’anticiper les enjeux de demain en nourrissant les décisions d’aujourd’hui. Pour Carole Martin, il s’agit d’une activité complémentaire qui découle naturellement du travail de ce service : «Les statistiques décrivent la réalité vaudoise avec des données passées et présentes. La prospective nous permet d’éclairer le futur en intégrant une dimension qualitative. Dans cette perspective, Statistique Vaud publie à un rythme quinquennal un rapport global. Construit autour de scénarios décrivant les futurs possibles du canton, ce rapport nourrit les réflexions du Conseil d’État lors de l’élaboration du programme de législature.» En outre, des études thématiques sont publiées tout au long de la législature sur des thèmes tels que la transition numérique ou énergétique. «L'objectif n'est pas simplement de se positionner par rapport à la législature actuelle, mais vraiment de se demander comment la société va évoluer», explique la cheffe de Statistique Vaud. (DA)

Numerus, une publication phare désormais gratuite

De la cybercriminalité aux soins à domicile en passant par la migration, les logements vacants, la mobilité ou encore les salaires, au cours des quarante dernières années et à raison d’une dizaine de numéros par an, Numerus a passé le canton au scanner. «À l’occasion de son 40e anniversaire, nous avons décidé que Numerus, l’une de nos publications phare, serait désormais diffusée gratuitement et sous forme électronique. Ce nouveau mode de diffusion favorise la mise à disposition des analyses de Statistique Vaud auprès du public. Car ces analyses sont utiles à la compréhension des évolutions en cours dans les différentes dimensions de la société», explique Carole Martin.

Et, afin de renforcer sa dimension analytique, Numerus propose désormais un article unique par numéro. « Vu la complexification du monde actuel, il nous a semblé nécessaire d’adapter Numerus en publiant des analyses thématiques, plus transversales.»

La mémoire collective du Canton

Conjointement, Statistique Vaud continue de publier son Annuaire statistique – dont c’est la 46e édition – qui présente annuellement un panorama chiffré et actualisé du canton. Pour le consulter, il suffit d’accéder à sa version en ligne qui offre un accès rapide à une information régulièrement mise à jour. «Cela permet de bénéficier d’une profondeur historique pour chaque tableau. Comme cet annuaire constitue un pilier central de notre mémoire collective, la version imprimée est maintenue dans la mesure où un support numérique ne peut pas assurer seul cette mission.»

Numerus : www.vd.ch/numerus

Annuaire statistique :www.vd.ch/stat-annuaire

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