Portrait de Michel Vust
Michel Vust, directeur général de la culture depuis 2024. Photo | ARC-Sieber
MétierCulture

Michel Vust: un regard panoramique sur la culture vaudoise

À la tête de la Direction générale de la culture (DGC) depuis un an, Michel Vust apporte à la politique culturelle vaudoise un regard nourri par 20 ans d’expérience dans les festivals, l’innovation et l’administration publique. Il défend une approche pragmatique et transversale, attentive à l’équilibre entre création, ancrage territorial et mutation technologique.

Michel Vust, directeur général de la culture depuis 2024. Photo | ARC-Sieber
4 minutes de lecturePublié le 30 oct. 2025

À 49 ans, Michel Vust a derrière lui un parcours professionnel à la fois éclectique et cohérent, qui couvre surtout un spectre inhabituellement large de l’univers culturel suisse, voire européen. Il fut tour à tour responsable éditorial du Festival international du film de Locarno, où il apprend à gérer une équipe. Codirecteur du Festival international du film fantastique de Neuchâtel, il y découvre la mécanique d’un grand événement dans tous ses détails. Il devient président de la Case à Chocs, directeur adjoint du festival de science-fiction Les Utopiales à Nantes, responsable de l’encouragement à la création numérique à la Fondation suisse pour la culture Pro Helvetia; puis, chef du Service de la culture de la Ville de Bienne de 2018 à 2024, il met en place une politique culturelle dans tous les domaines. Autant dire que Michel Vust a arpenté presque toutes les formes possibles de l’action culturelle, du travail de terrain à la réflexion stratégique.

Un moment clé

L’arrivée de Michel Vust à la tête de la DGC correspond au moment où le service (dont le budget annuel est d’environ 100 millions de francs) se mue en direction générale. Pour lui, cette requalification indique clairement l’importance de la culture dans les activités de l’État de Vaud: «Si le changement n’a pas bouleversé la structure, il a révélé les attentes politiques et institutionnelles, et confirmé une dynamique ainsi qu’une évolution continue.»

De l’extérieur, la mise en œuvre des nouvelles directives culturelles, notamment le renforcement de l’action dans le domaine des musiques actuelles ou l’élargissement à l’humour et l’improvisation, est perçue comme un signe bienvenu d’ouverture. Deux exemples concrets: dans le domaine des musiques actuelles, un nouveau soutien aux structures d’entourage vient d’être lancé en coordination avec le Canton de Genève ainsi que les Villes de Lausanne et Genève; dans celui de l’humour, une résidence d’écriture a été créée avec le Théâtre Boulimie.

Claude-Inga Barbey, au théâtre Boulimie à Lausanne, scène avec laquelle une résidence d’écriture a été créée, marquant l’élargissement des directives culturelles à l’humour et l’improvisation.

Une approche lucide

L’expérience acquise par Michel Vust à Pro Helvetia nourrit aussi la réflexion du directeur général, qui défend une approche lucide sur le numérique. «Aucun domaine artistique n’est épargné par la révolution numérique. Et si, face aux nouvelles technologies, on peut parfois observer une forme de technophobie dans le milieu culturel, il est essentiel de les comprendre pour mieux pouvoir appréhender leurs éventuels dangers, mais aussi leur potentiel.» Il rappelle que le Canton de Vaud a été pionnier en soutenant depuis 2019 des projets de jeux vidéo.

Soutenir la diversité

À la question des nouveaux publics, Michel Vust défend une approche à la fois structurelle et inclusive. «On peut faire en sorte d’intéresser davantage certains publics à l’offre institutionnelle, mais on doit aussi pouvoir considérer la diversité des goûts. Par exemple, améliorer l’intervention dans le domaine des musiques actuelles en soutenant mieux les lieux de concert, les labels et les artistes, permet une diversification des publics de la culture subventionnée.»

En termes d’accessibilité, Michel Vust évoque aussi les activités menées par l’Unité Accès à la culture de la DGC visant une meilleure participation culturelle des enfants, des jeunes et des publics empêchés, ainsi que le renforcement des ressources pour la médiation et la communication digitale dans les institutions patrimoniales cantonales. Mais pour le chef de la DGC, le cœur du dispositif se situe auprès des acteurs intermédiaires: «Dans l’approche des publics, nous nous appuyons essentiellement sur les acteurs du secteur qui possèdent une connaissance fine des artistes et de leurs publics potentiels, tels que les espaces et événements culturels ainsi que les structures d’entourage.»

Mesurer les évolutions et les besoins

Pour Michel Vust, le dialogue avec le monde culturel est également une condition essentielle de toute politique publique. «Celle-ci se fait en échange continu avec les milieux professionnels, mais aussi les communes, les autres cantons et la Confédération.» Ce dialogue est aussi un baromètre: «Il nous permet de mesurer les évolutions et les besoins, de consolider notre connaissance du secteur et d’adapter nos approches.»

«Nous disposons d’une offre publique et privée sans pareil.» Et chacun des dix districts développe une vitalité propre.»

Michel VustDirecteur général de la culture

Passionnant, stimulant, étourdissant

Depuis son entrée en fonction, le regard de Michel Vust sur la culture vaudoise s’est étoffé plus que transformé – «J’apprends tous les jours», note le directeur général. Estime-t-il que les Vaudoises et Vaudois sont gâtés en matière d’offre culturelle? «Nous disposons d’une offre publique et privée sans pareil.»  Et chacun des dix districts développe une vitalité propre. «À titre d’exemple, celui de Lavaux-Oron: Barnabé à Servion, le Théâtre du Jorat à Mézières, le Cully Jazz,… L’offre est incroyable.»

Se faufiler entre les algorithmes

Et s’il fallait imaginer un monde parfait, sans contrainte budgétaire, quel serait son rêve culturel? Michel Vust sourit: «Le rêve de démocratiser la culture s’est réalisé avec le développement d’Internet. Si ce rêve touche à l’universalisme et à la démocratisation de l’accès aux arts, il comporte aussi une dimension plus cauchemardesque… Une grande partie du marché des biens culturels étant dominée par quelques entreprises, la logique des algorithmes risque de nous enfermer dans nos propres bulles de goûts et d’intérêts. L’un des défis de demain sera donc de se faufiler entre ces algorithmes pour maintenir la diversité, la curiosité et le lien social dans un monde fragmenté.» (DA)

La collection Planque revient en terres vaudoises

La prestigieuse collection Jean Planque retrouvera le canton de Vaud à l’automne 2026. Fruit d’un accord entre la Fondation Jean et Suzanne Planque, la Ville de Vevey et l’État de Vaud, ce fonds exceptionnel de plus de 300 œuvres (Cézanne, Van Gogh, Monet, Picasso, Klee, Dubuffet…) sera désormais déposé au Musée Jenisch Vevey.

Pour Michel Vust, directeur général de la culture, «c’est une grande chance pour le canton et pour le public, qui aura accès à des œuvres majeures dans un lieu d’une grande qualité.» Il salue aussi «une formidable opportunité pour le Musée Jenisch, qui consolide ainsi sa position dans le paysage muséal suisse.»

Ce retour s’accompagnera d’une exposition inaugurale (6 novembre 2026 – 18 avril 2027) et d’un programme de médiation ambitieux. «Nous avons tenu à ce que les autres musées vaudois puissent aussi bénéficier de prêts de la collection», précise encore Michel Vust, voyant dans cette politique de circulation des œuvres « un gage d’ouverture à l’ensemble du canton de Vaud. » (DA)

Michel Vust vu de derrière, alors qu'il prend une photo des personnes qui parlent lors de la conférence de presse.Michel Vust le 12 septembre, lors de l'annonce du retour de la Collection Planque. Photo | ARC-Sieber

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