Absence longue durée: comment repartir du bon pied
Des maladies auto-immunes à la dépression en passant par des déficiences visuelles ou auditives, il existe mille maux qui peuvent justifier un recours au secteur de réinsertion professionnelle du Service du personnel de l’État de Vaud. Neutre, bienveillant et efficace, il est un soutien précieux pour les collaboratrices et collaborateurs de l’administration cantonale qui connaissent des difficultés de santé. Focus sur un secteur qui ne chôme pas.
En 2017, l’Observatoire suisse de la santé évaluait à plus de 28% les Vaudoises et Vaudois souffrant d’un problème de santé nécessitant une absence de longue durée (ndlr : dès trente jours). À l’administration cantonale, premier employeur du canton avec plus de 30'000 personnes salariées, cela fait pourtant déjà 15 ans que le Service du personnel de l’État de Vaud (SPEV) a mis en place le secteur de Réinsertion professionnelle qui travaille au coude à coude avec l’Unité sécurité et santé au travail (USST) afin d’accompagner au mieux ce genre de situations. Comme l’illustre Maria Undurraga, responsable de cette réinsertion, «l’USST cherche à prévenir et contenir le feu en faisant de la prévention primaire et secondaire, et la réinsertion professionnelle est là pour l’éteindre…» Son objectif ? Offrir d’abord un service d’accompagnement aux personnes rencontrant des problèmes médicaux susceptibles d’affecter leur vie professionnelle, et tout faire pour les réinsérer ensuite au sein de l’État, «que ce soit à leur poste, à un autre poste ou même dans un autre service».
«Ce n’est pas parce qu’on a été malade ou que l’on souffre d’un handicap — visible ou invisible — que tout est fini et que l’on n’est plus bon à rien.»
Prévenir et aider à guérir
Selon Maria Undurraga, psychologue de formation en poste au SPEV depuis 2014, les absences longue durée sont en augmentation depuis 2019. «Sans doute parce que notre secteur est de plus en plus reconnu», remarque-t-elle. Tout en reconnaissant que l’évolution des modes de travail a généré, malheureusement, une souffrance nouvelle comme l’augmentation des risques psychosociaux. «Mais ce n’est pas parce qu’on a été malade ou que l’on souffre d’un handicap — visible ou invisible — que tout est fini et que l’on n’est plus bon à rien. Notre rôle est aussi de faire comprendre cela aux employeurs comme aux collaborateurs et collaboratrices afin d’éviter toute discrimination. Nous organisons par exemple des formations pour les cadres et les RH, car la gestion des absences concerne vraiment tout le monde.»
Parfois, quelques aménagements peuvent même suffire: «Pour une personne atteinte de surdité, on va par exemple éviter de lui assigner des tâches au standard téléphonique, mais elle pourra être parfaite ailleurs.» Si le rôle de la réinsertion professionnelle est d’abord de faciliter la résolution de l’incapacité de travail de longue durée, elle est aussi destinée à agir à titre préventif comme dans les cas de burn-out ou de maladies professionnelles identifiées. «Si un cantonnier commence à ressentir des douleurs au genou, nous pourrions déjà réfléchir à un aménagement de son poste, voire à une reconversion progressive», explique la responsable de l’unité.
«Pour une personne atteinte de surdité, on va par exemple éviter de lui assigner des tâches au standard téléphonique, mais elle pourra être parfaite ailleurs.»
Mais entre les 500 à 600 absences longue durée enregistrées en moyenne chaque année au sein de l’administration, le secteur n’en gère que quelque 250. «En effet, certains «cas simples» restent au niveau des RH des services ou de l’assurance accidents, comme une jambe cassée ou une hernie discale, qui entraîne nécessairement, on le sait, six semaines d’arrêt.» Le secteur de la réinsertion gère avant tout les cas qui n’ont pas de pronostic de reprise. Parmi eux, comme l’explique Maria Undurraga, «une fourchette variée de pathologies allant des cancers aux maladies auto-immunes ou neuropathiques, en passant par la dépression ou encore quelques Covid longs, dont l’évolution est encore mal connue.»
Un suivi de A à Z
Notre rôle est d’abord de soutenir la personne malade, ensuite de s’assurer que le service de l’État fonctionne. À cet égard, pour la réinsertion proprement dite, plusieurs pistes existent, comme l’aménagement du cahier des charges, la mise en place du télétravail, la réalisation d’un bilan de compétences, voire le suivi de stages dans d’autres services «afin de remobiliser la personne.»
Ensuite, le rôle du «case manager» au sein du secteur (qui s’occupe du dossier d’une personne de A à Z) rejoint un peu celui du chef d’orchestre: c’est lui qui fait le lien avec le médecin traitant du collaborateur ou de la collaboratrice, les assurances, le service, les ressources humaines, et qui aide également à diverses démarches administratives. Une approche globale bienvenue quand la personne est souvent fatiguée, voire désorientée. «On s’assure ainsi de construire la reprise», résume Maria Undurraga. Les liens avec Unisanté sont aussi précieux, l’objectif du médecin du travail étant de soutenir l’articulation entre les enjeux médicaux et professionnels. «Quand nous sommes arrivés au seuil de nos compétences au sein du secteur, nous pouvons les solliciter afin d’effectuer une évaluation ergonomique à un poste de travail, clarifier une situation médicale complexe ou mettre en place des mesures d’accompagnement en cas de dépendances. Et si l’on ne trouve pas de solution en interne, nos services coordonnent la situation avec l’office AI.»
«En tout cas, nous ne sommes pas confrontés, dans nos métiers, à une quête de sens ; on sait bien pourquoi l’on fait tout ça.»
Une mission qui a du sens
Si les cas rencontrés sont assez variés, Maria Undurraga constate que les thématiques psychiques sont en hausse depuis l’épidémie de Covid-19 et le premier confinement. Qu’elles arrivent au secteur de leur propre chef ou sur recommandation des ressources humaines de leur service, ces personnes en situation de détresse sont prises en charge par l’équipe de Maria Undurraga: «Ce n’est pas toujours simple, on va parfois au domicile de personnes qui, dans ce cadre-là, se livrent souvent plus facilement. Et il n’est pas rare, même pour nous, que des émotions ressortent après ce genre d’entretiens … Mais cela permet d’évacuer. En tout cas, nous ne sommes pas confrontés, dans nos métiers, à une quête de sens ; on sait bien pourquoi l’on fait tout ça», mentionne la responsable. Ce que des témoignages de bénéficiaires viennent corroborer, en évoquant l’écoute sans jugement de ces professionnels et leur précieux soutien moral, loin du contexte hiérarchique qui peut parfois s’avérer paralysant. Cette équipe de choc est composée d’un patchwork de professions, de l’électronicien multimédia à l’historienne de l’art, toutes et tous formés aux ressources humaines ou au case management. Un bel exemple qui prouve que la réinsertion, ça a du bon. (EB)
Le saviez-vous ?
En cas d’absence maladie longue durée (pour les contrats à durée indéterminée), la totalité du salaire est versée pendant les 360 premiers jours d’absence (droit au salaire en plein). Pendant les 90 jours suivants, 80% du salaire est versé (réduction du salaire). Par la suite, le salaire n’est plus versé (suppression du salaire), mais d’autres solutions peuvent alors prendre le relais, comme la Caisse de pensions de l’État de Vaud.