Enfants vulnérables cherchent familles d'accueil
Ils et elles sont de plus en plus nombreux à avoir besoin de protection. Pour venir en aide à des centaines d’enfants chaque année, la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse (DGEJ) lance une opération de recrutement de familles d’accueil. En coulisses, une douzaine de personnes contribuent à cette mission essentielle, qui nécessite rigueur et cœur. Responsable du Pôle adoption et accueil familial, Béatrice Filiti décortique les différentes étapes d’un processus de recrutement délicat.
Pour faire face à un nombre croissant d’enfants vivant dans un milieu familial en crise – et susceptible de les mettre sérieusement en danger dans leur développement psychologique, mais parfois aussi physique –, la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse (DGEJ) lance une campagne de recrutement de familles d’accueil. Avec un objectif simple, mais ambitieux: trouver 50 nouvelles familles d’accueil.
Concernant les enfants dont la garde est retirée aux parents pour des besoins de protection, il existe différents types de placements. Auprès d’autres membres de la famille ou, quand cela n’est pas possible, le DGEJ fait appel à des familles d’accueil où ils seront placés pour une durée indéterminée, de quelques mois à plusieurs années. Pour les mineurs plus âgés, et dont le besoin de protection est moindre, il peut s’agir d’un accueil relais : «Le temps d’un week-end ou de vacances, cela peut constituer, dans leur jeune parcours de vie déjà tumultueux, une précieuse bouffée d’oxygène. Je pense aussi à ces enfants qui grandissent en institution et pour qui il est particulièrement important de pouvoir vivre des liens affectifs dans un milieu familial», indique Béatrice Filiti, à la DGEJ.
Besoin de figures d’attachement
Existe-t-il un profil type de ces enfants en mal de famille? Béatrice Filiti, qui compte plus de vingt ans d’expérience dans ce domaine si sensible, tente d’en dessiner les contours: «Lorsqu’il s’agit d’un accueil à plein temps, nous parlons des enfants qui doivent être impérativement placés par mesure de protection, et donc pour une durée indéterminée, parce qu'ils ne peuvent plus vivre au sein de leur famille biologique. Ce sont des bébés, des enfants ou des adolescents dont les parents rencontrent des difficultés éducatives, psychologiques ou encore sociales, et qui seront parfois amenés à présenter des troubles d'attachement ou d’autres types de carences affectives. Mais tout dépend de l’âge de l’enfant, de son tempérament, de ce qu’il aura enduré…»
Pour Béatrice Filiti, l’accueil dans une famille est particulièrement adapté pour des enfants en bas âge : «Entre les premiers jours de leur naissance et l’âge de trois ans, ils ont tout particulièrement besoin de pouvoir s’attacher à une ou deux personnes qui deviendront, justement, des ‘’figures d’attachement’’, en qui ils pourront avoir confiance et qui répondront à leurs besoins de sécurité.»
"Il n’est pas nécessaire d’être marié pour devenir famille d’accueil, le recrutement étant ouvert aux célibataires et aux couples LGBT+"
Une procédure simple, mais rigoureuse
Dans le souci permanent de permettre à ces jeunes de grandir dans un cadre apaisé, la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse accorde un soin tout particulier au recrutement de familles d’accueil, surtout pour de très jeunes enfants. Sans compter ceux placés auprès de membres de leur famille élargie, quelque 200 enfants sont ainsi accueillis par environ 190 familles vaudoises, soit à plein temps, soit le temps d’une pause. «Les 50 nouvelles familles que nous cherchons permettraient de combler le manque tout en renouvelant notre capacité d’accueil», souligne Béatrice Filiti.
Comme on peut facilement l’imaginer, un recrutement d’une telle ampleur n’est pas une mince affaire et mobilise presque l’ensemble des douze collaboratrices et collaborateurs qui entourent Béatrice Filiti. Car si la procédure est relativement simple, elle n’en est pas moins rigoureuse. Tout comme les critères de postulation. Il faut, notamment, avoir 25 ans révolus, résider en Suisse et beaucoup de disponibilité. «J’aimerais préciser qu’il n’est pas nécessaire d’être marié pour devenir famille d’accueil, le recrutement étant ouvert aux célibataires et aux couples LGBT+.»
Plongée dans l’intimité
Béatrice Filiti décortique les différentes étapes auxquels devront se conformer les personnes ayant manifesté leur intérêt à accueillir un enfant au sein de leur foyer. «Tout commence par une séance collective d’information et d’échanges qui réunit les candidats, deux personnes du service chargées des évaluations et une famille d'accueil expérimentée qui va partager son expérience et répondre aux innombrables questions qu’une telle démarche ne manque pas de soulever: «Nous expliquons en détail toutes les phases du processus et ce qu’elles peuvent avoir d’indiscret. C’est aussi à ce moment qu’on demande aux gens de bien réfléchir s’ils souhaitent ou non poursuivre.»
La suite de la procédure d'évaluation concerne les conditions d'accueil. Les familles candidates commencent par fournir des documents administratifs, tels que leur casier judiciaire. Une fois ce dossier constitué, débute alors l'évaluation sociale des conditions d'accueil. Concrètement, deux chargés d'évaluation vont rencontrer les candidats avec lesquels ils vont mener entre trois et quatre entretiens. Ces rencontres permettront d'établir une évaluation générale de la famille — autant sur ses qualités personnelles et éducatives que sur ses disponibilités et son logement. «Il faut reconnaître que les entretiens sont relativement intrusifs, mais cela est nécessaire si l’on veut bien comprendre le fonctionnement de la famille, souligne Béatrice Filiti. Toutefois, les candidats en sont informés dès le départ et l’immense majorité en comprend très bien la finalité.»
Un accompagnement au plus près des familles d’accueil
Au terme de cette phase d’évaluation qui prend un peu plus de trois mois, deux chargées d’évaluation travaillant sur chaque dossier rédigent un rapport et émettent un préavis, favorable ou pas. «À partir de ce moment, nous pouvons délivrer une autorisation d'accueil en fonction du projet qui aura été déterminé avec la famille. Il est crucial que la famille soit parfaitement au clair avec la tranche d’âge de l’enfant et la durée de l’accueil: un plein temps ou un accueil relais, ou pour de simples « dépannages».
Si le préavis est positif, l'autorisation d’accueil sera rapidement délivrée. «À partir de ce moment, nous allons chercher parmi les enfants en attente d’un placement celui dont le profil correspond le mieux à cette famille et ses attentes. Et si l’assistante sociale en charge du dossier est en phase avec ce choix, nous contactons la famille à qui nous donnons déjà quelques informations de base avant d’organiser une réunion entre toutes et tous. L’objectif est de préparer progressivement l'accueil, d’en définir les objectifs et les modalités, d’évaluer également si une rencontre avec les parents biologiques est possible ou souhaitable, ce qui n'est pas toujours le cas… Même si l'idée est de les intégrer autant que possible dans la démarche.»
Une fois que l’enfant est là, les personnes chargées de l’évaluation restent présentes pour accompagner les familles tout au long de l’accueil. «Et si un enfant devait brusquement présenter des difficultés de comportement une fois placé – ce qui est rare –, nous mettons rapidement en place toute une série de mesures permettant de soutenir et soulager la famille d’accueil. Un référent restera toujours en contact avec eux, assumant un rôle essentiel de soutien, également de surveillance, ce qui joue en faveur de l’enfant, mais également de la famille d’accueil.» (DA)
Chez vous?
Si vous souhaitez postuler et devenir famille d’accueil, rien de plus simple. Il suffit de répondre à un test de dix questions qui se termine par un formulaire de candidature.
Le site internet « Devenir famille d’accueil » mérite une lecture attentive. Il fourmille d’informations et répond en grande partie aux légitimes questions qu’une démarche de cette nature peut soulever.