Le passage au bulletin unique: une vraie réussite
Les dernières élections fédérales, en octobre puis en novembre, ont permis l’introduction du bulletin unique. Celui-ci a-t-il donné satisfaction? Liliana Peixoto, spécialiste des droits politiques à la Direction des affaires communales et droits politiques, livre son verdict.
Le système du bulletin unique a passé son baptême du feu à l’occasion des dernières élections fédérales, en octobre puis en novembre, où il a fallu élire les membres du Conseil des États et du Conseil national. Et on peut légitimement affirmer qu’il a fait ses preuves. Haut la main, même, comme on dit dans les cantons de Glaris et d’Appenzell Rhodes-Intérieures, où se rassemble encore la Landsgemeinde.
Mais attardons-nous d’abord sur cette notion de bulletin unique. Depuis le 1er juillet, le traditionnel cahier de bulletins électoraux a été remplacé lors des élections reposant sur un système majoritaire par un unique bulletin électoral, où sont présentées toutes les listes électorales de chaque parti ou alliance (Gazette de juillet 2023). Verdict? «L’introduction du bulletin unique a permis de gagner un temps considérable lors du dépouillement, remarque Liliana Peixoto, spécialiste des droits politiques à la Direction des affaires communales et droits politiques. J’ai entendu des échos de plusieurs communes qui allaient dans ce sens et montraient également que ce système était très intuitif.»
«L’introduction du bulletin unique a permis de gagner un temps considérable lors du dépouillement. Plusieurs communes ont trouvé ce système très intuitif.»
Concrètement, la spécialiste évoque près de 90 minutes économisées pour la publication des résultats cantonaux lors de chacun des deux tours, ce qui a permis de gagner un temps notable dans le dépouillement de l’élection au Conseil national qui se déroulait en parallèle. «On a clairement battu des records, poursuit-elle. Ce gain de temps a offert la possibilité aux communes de se focaliser un peu plus encore sur le respect des processus. En plus, la transmission des résultats engendre moins de stress; les communes n’ont plus cette peur d’être les dernières à rendre leurs résultats. Au second tour de l’élection au Conseil des États, nous n’avons d’ailleurs pas eu besoin de contacter d’éventuels retardataires.» Quant au nombre de bulletins nuls, il a drastiquement diminué, passant de 1,4% en 2019 à 0,45 % en 2023. De plus, les partis politiques et la presse ont apprécié l’opportunité de recevoir de nouvelles statistiques sur la distribution des suffrages (par exemple, 33% des votants ayant donné un suffrage à Pierre-Yves Maillard ont également voté pour Pascal Broulis au premier tour).
Du temps et de l’argent
Du temps a également été grappillé lors de la production des bulletins, ce qui est particulièrement appréciable entre les deux tours, car le matériel de vote doit rapidement être envoyé aux 450’000 électeurs. «En l’espace d’une semaine – contre une dizaine de jours auparavant –, tout était prêt, car il n’y a notamment plus besoin d’assembler des feuilles en cahiers.» Bien entendu, le bulletin unique permet également des économies de papier, et donc de réduire l’impact environnemental des scrutins.
N’y a-t-il eu aucun nuage au-dessus des urnes? Un tout petit, concède Liliana Peixoto. «Quelques centaines de bulletins ont été découpés en deux, déplore-t-elle. Certaines personnes ont en effet séparé la partie gauche de la droite, alors que le bulletin était une feuille A4. Certainement les vestiges de l’ancienne manière de faire, où il fallait détacher une liste du cahier. Nous avions pourtant mentionné que l’entier du bulletin devait être utilisé.» Ces bulletins ont pu être comptabilisés, mais leur saisie a dû être faite manuellement, et non par l’entremise d’un scanner, ce qui a pris un peu plus de temps.
À l’avenir?
Les prochaines élections sont les communales, en 2026. Procédera-t-on à des adaptations d’ici là? «Nous réfléchissons à des améliorations, répond la spécialiste. Notamment s’agissant des bulletins découpés par les électeurs. Un problème tout relatif, tant ces erreurs sont marginales et le système performant.» Le choix politique du bulletin unique a donc fait mouche. Peut-on parler de solution ultime? «En termes de durée, il sera compliqué de faire mieux, sachant que les bureaux de vote ont été fermés à 11 heures et que les résultats ont été connus à 13 h 30, ce qui est exceptionnel», explique Liliana Peixoto.
Mais à l’heure où l’intelligence artificielle se développe à grande vitesse, ne doit-on pas s’attendre à la voir révolutionner notre manière de voter dans un proche futur? «Elle pourrait jouer un rôle dans la prédiction des résultats grâce aux historiques de votes précédents sur des objets similaires, estime l’employée de l’État de Vaud. L’autre fonction de l’IA pourrait être lors de la suspicion d’erreurs par rapport aux habitudes de vote, notamment quand le scrutin est très serré.» À en croire Liliana Peixoto, qui examine aujourd’hui les remarques des communes et des électeurs sur cette nouvelle manière de voter, le bulletin unique a encore de beaux jours devant lui. (FR)