Le «renatureur» des rives
Olivier Stauffer est le chef de la section Aménagement des cours d’eau et des rives lacustres du canton de Vaud. Une unité attelée à réinstaurer des environnements propices au développement durable d’écosystèmes riches et variés. Il nous accueille sur le site du projet-pilote de Dorigny à Saint-Sulpice, qui vise à renaturer cette portion de rive du Léman pour y laisser se développer la biodiversité, en harmonie avec l’activité humaine qui s’y déroule habituellement.
Olivier Stauffer, chef de section au sein de la Direction générale de l’environnement, a suivi un parcours motivé par un profond respect pour la nature. Diplômé de la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture, il commence sa carrière dans un bureau privé avant de rejoindre l’administration cantonale vaudoise. Son parcours académique comprend également un apprentissage de laborant en biologie à l’Université de Neuchâtel, où il découvre les subtilités du travail en laboratoire tout en développant un fort intérêt pour le terrain. C’est tout naturellement qu’il a recherché un équilibre entre la théorie et la pratique, le conduisant vers une carrière qui allie ces deux aspects.
Le rôle du chef de section
En tant que chef de section, Olivier Stauffer coordonne une équipe de sept personnes au sein d’une division qui en compte soixante-huit. Sa mission principale est de superviser et de coordonner des projets d’aménagement et de renaturation des cours d’eau. Les rives des lacs se sont ajoutées récemment à son champ d’action. Il s’attèle à garantir que chaque projet avance conformément aux attentes, tant en termes de délais que de budget. Ainsi, Olivier Stauffer et son équipe intègrent des thématiques variées, allant de la protection contre les crues à la renaturation et le ruissellement des eaux de surface. L’unité pilote plusieurs projets qui ne manquent pas de défis. Parmi eux, l’acquisition des terrains est souvent une phase longue et délicate, nécessitant de rassurer et de convaincre de nombreux acteurs, qu’ils soient publics ou privés. «C’est une étape très sensible», lâche-t-il. Une fois franchies, les difficultés sont principalement techniques et peuvent être résolues grâce à la collaboration étroite entre les équipes et les mandataires spécialisés. Le financement représente également un enjeu majeur, d’autant plus que les subventions de la Confédération pourraient tendre à diminuer ces prochaines années, précise le spécialiste, ralentissant potentiellement le déploiement des projets.
Le projet-pilote de Dorigny
Qu’il semble loin, le temps où l’on pouvait apercevoir les bovins pâturer en s’abreuvant dans les eaux du Léman. Avant les enrochements, des rives en pente douce bordaient des zones peu productives ; les terrains destinés à l’agriculture extensive y étaient nombreux. «Lors des réaménagements de parcelles, on a voulu lisser la topographie et remblayer les rives. À l’époque, le but était d’en stabiliser les lignes. Le projet, ici à Dorigny, est de revenir à une pente douce comme c’était le cas autrefois.» Ces enrochements, que l’on peut observer aux abords du Léman, souvent massifs, furent et sont encore utiles à certains endroits, explique Olivier Stauffer. Néanmoins, dans des lieux semblables à Dorigny, ils présentaient des signes d’érosion croissante, ce qui produit de l’instabilité sur la rive. Le projet a pour but d’installer des palissades anti-érosion qui permettent le développement d’une succession de milieux naturels en direction de la rive. On y installera également, pour le bonheur des passants, une plateforme en bois pour observer le futur milieu naturel réaménagé. C’est ainsi que ce projet, s’étalant sur 250 mètres, s’inscrit dans cette volonté du plan d’action biodiversité du canton de Vaud pour permettre à la nature de reprendre ses droits, autant que faire se peut.
Parmi les initiatives phares d’Olivier Stauffer et son équipe, le projet de Dorigny se distingue. Il s’agit du premier projet réalisé dans le cadre de la planification des rives des lacs vaudois, lancée il y a un an. Ce projet, situé sur le site de l’Université de Lausanne, a bénéficié de la collaboration étroite de cette dernière. Ce partenariat a grandement facilité l’acquisition des terrains, une étape souvent sensible et déterminante pour le succès du projet. Ce site, très fréquenté par le public, illustre parfaitement la cohésion entre renaturation et accessibilité, permettant à la fois de revitaliser l’écosystème et de maintenir l’usage public de l’espace.
Pour Olivier Stauffer, ce projet prenant réellement forme lors de notre passage, motive les équipes et sa direction à continuer sur cette voie. «Cette réalisation enthousiasme le groupe et permet de surmonter les obstacles financiers, administratifs ou techniques.» Une fois les projets achevés, ils font également l’objet de suivis biologiques attentifs, conduits sur plusieurs années, mesurant notamment la recolonisation de la faune et de la flore sur les sites.
De la planification à la réalisation
Ce «renatureur», engagé dans la promotion de la biodiversité et résolument passionné, incarne l’engagement nécessaire pour mener à bien des projets de revitalisation ambitieux. Au détour d’une question, il tient à souligner l’engagement de ses équipes, ainsi que d’autres parties prenantes comme les cantonniers des eaux qui assurent l’entretien des cours d’eau. «On a vraiment observé, de la part de tous les acteurs, un élan en vue de promouvoir, restaurer et développer la biodiversité cantonale.»
En finalité, avec ce projet-pilote, Olivier Stauffer espère accomplir une collaboration harmonieuse entre divers acteurs au service de la nature et du public. Ceci, dans le but d’insuffler une motivation pour de prochains partenariats. Dorigny pourrait ainsi servir de «vitrine» pour des communes, possiblement tentées de réaliser de telles opérations à l’avenir. Tout du moins, la joie se lit sur son visage quand il nous parle de sa plus grande fierté : la concrétisation des projets. «Lors des phases de travaux, on voit les choses qui se dessinent. Après de longues périodes de planification, quand tout prend forme, c’est là que la satisfaction est la plus grande.»
Pour le moment, il faudra attendre encore quelque temps avant d’y pouvoir observer une faune et une flore revitalisées. Bientôt, roselières, aulnaies et autres saulaies buissonnantes pourront y prospérer, en symbiose avec brochets, écrevisses et autres oiseaux lémaniques. (LZ)