Pierre Henrioux fait partie des neuf surveillants de la faune terrestre qui ont pour tâche de veiller aux bons rapports entre l’humain et l’animal ici dans la Grande Cariçaie. | Photo: BIC (FA)
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La faune sous bonne garde

Castors, loups, cerfs, grenouilles ou canards. Autant d’espèces parmi les centaines qui composent la faune sauvage avec laquelle cohabitent Vaudoises et Vaudois au quotidien, dont les rapports font aussi l’objet d’un contrôle étroit pour que tous partagent au mieux un territoire commun. Explications avec Pierre Henrioux, surveillant de la faune.

Pierre Henrioux fait partie des neuf surveillants de la faune terrestre qui ont pour tâche de veiller aux bons rapports entre l’humain et l’animal ici dans la Grande Cariçaie. | Photo: BIC (FA)
4 minutes de lecturePublié le 11 sept. 2020

La période de semi-confinement a modifié les habitudes de chacun. Parmi lesquelles le temps consacré à contempler la nature qui nous entoure. Une partie de celle que le mode de vie «métro, boulot, dodo» rend pratiquement impossible à voir. Parfois même à simplement concevoir.

De mars à fin mai, depuis les balcons ou en promenades régulières, beaucoup ont eu l’impression que la faune s’était faite plus présente, en ville notamment. C’est vrai, mais en partie seulement, confirme Pierre Henrioux, surveillant de la faune pour la région Yverdon, Payerne, Avenches, Lucens, depuis près de 30 ans.

La Grande Cariçaie. | Photo: BIC (FA)

«Les gens ont pris plus de temps pour regarder ce qui se passe autour d’eux, pour contempler la nature. Mais les animaux ont parfois aussi changé leur comportement.» C’est par exemple le cas des castors, que le simple quidam diurne ne devrait pas être en mesure d’apercevoir. «À l’Institut équestre national d’Avenches, comme les courses ont été stoppées, le castor a été vu, traversant la piste, parfois jusqu’à 11 heures du matin. De même qu’il a été fréquent d’observer des familles de canards s’installer dans des villes ou villages et brouter l’herbe dans des jardins» illustre l’ancien forestier-bûcheron de 62 ans.

Photo | BIC (FA)

Au service à la fois de l’humain et de l’animal

Pierre Henrioux fait partie des neuf surveillants de la faune terrestre qui ont pour tâche de veiller aux bons rapports entre l’humain et l’animal en terres vaudoises. Au sein du même corps, neuf autres collègues occupent la fonction de garde-pêche. «Du côté des surveillants de la faune terrestre, la chasse est la mission qui nous occupe la majeure partie du temps dès la fin de l’été jusqu’en février. Il y a toute une succession de chasses pour lesquelles nous devons faire la police.» Un travail de terrain en patrouilles, parfois avec la gendarmerie, pour s’assurer que les 700 chasseuses et chasseurs vaudois respectent les règles et les lois, ainsi que les espèces d’animaux prélevés.

À noter justement qu’il ne suffit pas d’obtenir un permis pour tirer un animal. Car derrière la notion de chasse se cachent plusieurs catégories d’animaux qu’il est, selon les périodes, interdit de prélever. «Les chevreuils et lièvres par exemple ne peuvent être chassés qu’en octobre», explique Pierre Henrioux.

En dehors des périodes de chasse, les surveillants de la faune réalisent notamment une mission de gardiennage et de gestion de la faune. «Le sanglier par exemple nous préoccupe beaucoup. Il cause de nombreux dégâts dans le milieu agricole et il nous faut donc en abattre pour réguler les populations.»

Reste encore évidemment les cas où les surveillants de la faune sont appelés pour s’occuper de la capture d’un animal fugitif. Selon les cas, ils sont parfois téléanesthésiés avant d’être relâchés en milieu naturel. Comme les deux chamois égarés l’an dernier à la piscine de Morges. «Lorsque nous sommes appelés, nous devons apprécier chaque situation avant de prendre une décision quant au sort de l’animal. Évidemment, il nous faut agir rapidement. Nous intervenons parfois pour des animaux qui s’aventurent sur l’autoroute. Dans pareille situation et vu le danger de ces incursions, l’animal est abattu. Utiliser des fléchettes hypodermiques ici est complètement inenvisageable.»

«Lorsque nous sommes appelés, nous devons apprécier chaque situation avant de prendre une décision quant au sort de l’animal. Évidemment, il nous faut agir rapidement.»

Pierre HenriouxSurveillant de la faune

Une nature plus proche

Une certitude pour Pierre Henrioux, le rapport à la nature, qu’il s’agisse de la faune ou de la flore, a changé. « Il suffit de voir le nombre d’émissions qui traitent de ces sujets pour s’en rendre compte. » Raison pour laquelle le travail du surveillant de la faune comprend aussi et de plus en plus une grande part d’information au public, et donc de pédagogie. « À Yverdon par exemple, la prolifération du goéland leucophée pose différents problèmes, aussi bien à cause de son cri que des fientes ou des déprédations qu’il cause au matériel se trouvant sur les toits, comme des panneaux solaires. Comme il s’agit d’une espèce protégée, qui niche de plus en plus dans les villes, nous devons expliquer à la population ces phénomènes et le cadre légal. »

Le travail du surveillant de la faune comprend de plus en plus une part d’information au public. | Photo: BIC (FA)

En dehors du domaine de la chasse, il incombe aussi aux surveillants de la faune d’apprécier les intérêts des uns et des autres. Comme lorsqu’il s’agit de préserver le droit de la faune à investir l’espace habituellement habité par l’homme. «Au cours du confinement, j’ai été appelé sur la base aérienne de Payerne pour un nid de rougequeue noir dans le réacteur d’un Tiger. Nous avons attendu la naissance des petits, environ deux semaines plus tard, pour déplacer le nid, ce qui a aussi laissé le temps de construire un nichoir.» (DT)

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